Enseigne-t-on le genre à l'école ?
Par Olympe le 25/02/2014, 15:56 - Lien permanent
ça ne vous aura pas échappé, désormais vos enfants apprennent le genre à l'école si vous êtes dans l'une des 10 Académies tests. Du moins, c'est ce que vous avez lu et entendu partout même si, après avoir pourtant essayé de vous renseigner, vous n'avez qu'une vague idée de ce que cela peut signifier.
Sur un sujet aussi sensible puisqu'il concerne nos enfants il est facile de construire des amalgames effrayants et des raisonnements spécieux.
Tout est sur le site des ABCD de l'égalité, qui pêche plutôt par trop d'informations que pas assez. Et vous le savez, trop d'infos tue l'infos.
Les ABCD de l'égalité
Les objectifs
Comme vous pouvez le noter d'emblée, dans "ABCD de l'égalité", qui est un site très officiel de l'éducation nationale, il y a le mot "égalité" . C'est parfaitement clair et bien indiqué , il s'agit d'enseigner l'égalité filles/garçons . Car, je cite, "L’École de la république a trois missions : instruire les enfants, préparer leur insertion professionnelle et leur transmettre les valeurs de la République. Au cœur de ces valeurs figure l’égalité."
Cette mission est inscrite dans la loi depuis 1989, mais jusqu'à une date récente elle avait mobilisé peu de monde.
Le site précise ensuite que "en améliorant l'enseignement à l'égalité garçons-filles, le ministère poursuit plusieurs objectifs :
- Renforcer l'éducation au respect mutuel entre les filles et les garçons
- Lutter contre les stéréotypes, et donc contre toutes les discriminations
- Œuvrer pour la mixité des filières de formation et en faveur de l'égalité professionnelle"
Compte tenu des polémiques liées à ce sujet, je suppose que chaque mot a été pesé. On trouve pourtant, à mon avis, dans ces 3 lignes, les prémisses de possibles confusions.
L'égalité passe par le respect de l'autre. Difficile d'être contre. Tout comme on ne voit pas trop qui pourrait se déclarer opposé à l'égalité professionnelle et même à la mixité des filières de formation.
Il faut lutter contre les stéréotypes, c'est évident, et c'est ce que j'essaye de faire ici depuis que je tiens ce blog. L'égalité entre les hommes et les femmes passe forcément par la déconstruction des stéréotypes qui nous enferment dans des rôles socialement (et non biologiquement) déterminés.
La suite "et donc lutter contre les discriminations" est logique pour toute personne qui s'est intéressée de façon un peu approfondie au sujet ; qui démonte les stéréotypes démonte les mécanismes des discriminations, de toutes les discriminations.
On sait aussi que la façon dont les genres sont stéréotypés abouti à la vision d'hommes et de femmes supposés avoir certaines caractéristiques (hommes forts, courageux, actifs, poilus...., femmes fragiles, sensibles, jolies etc) et que toute personne qui s'en éloigne de façon trop marquée se retrouve dans la catégorie des exclus. C'est le cas notamment des personnes homosexuelles.
Mais il existe de multiples autres discriminations, celles qui sont liées à l'origine, à la couleur de la peau, au poids, au handicap etc etc et il est vrai qu'apprendre aux enfants à réfléchir à ce que sont les stéréotypes c'est leur donner des outils pour comprendre toutes les discriminations. Personnellement je n'aurais pourtant pas mis là cette partie de phrase. C'est un débat récurrent, qui revient souvent dans les tables rondes auxquelles il m'arrive de participer : les femmes ne sont pas une catégorie sociale, elles sont la moitié de l'humanité dans TOUTES les sociétés et le sujet de l'égalité hommes/femmes ne peut pas être traité comme d'autres discriminations, même si les outils pour comprendre peuvent être les mêmes.
Les outils, la pédagogie
1/ Outils de formation.
2/ Outils pédagogiques
Voici aussi la fameuse fiche, qui a tellement scandalisée Eric Zemmour, avec le portrait de Louis XIV.
3/ Ressources documentaires
Les amalgames
Il importe de distinguer plusieurs démarches, qui ont évidemment des liens forts entre elles puisqu'elles concernent le sexe, le genre et l'éducation mais qui permettent, lorsqu'on les mélange, des raisonnements de mauvaise foi, et propres à effrayer n'importe quel parent.
Sa démarche est celle-ci (en gros) :
- l'éducation à l'égalité c'est l'introduction de la théorie du genre à l'école
- si les filles et les garçons c'est pareil les garçons vont mettre des jupes, et les filles des pantalons, et jouer à la poupée
- si les garçons mettent des jupes ils vont devenir homosexuels
- tout ça c'est la faute à mai 68
- la preuve !!
Je caricature à peine.
Rappelons donc que :
L'éducation à l'égalité ce n'est pas l'éducation sexuelle.
Ce n'est pas d'aujourd'hui que l'école est chargé d'enseigner le respect et la non discrimination.
Ce n'est pas parce que les garçons jouent à la poupée ou les filles au foot qu'ils deviennent homosexuels. Si c'est cela qui vous fait peur.
L'école n'a pas vocation à faire du prosélytisme envers une quelconque situation familiale
Elle ne le fait pas. Elle accueille tous les enfants, quel que soit le statut ou le genre de leurs parents. Les plus de 50 ans se rappellent peut être comme il était difficile d'être enfant de divorcés, ou pire, de "fille-mère"
La partie immergée de l'iceberg ?
Pour finir, mon interrogation personnelle porte sur autre chose.
Je me demande quand même si on ne s'intéresse pas surtout à la partie visible de l'iceberg. Les études sur le genre montrent, et c'est bien expliqué dans la conférence de Véronique Rouyer, que si les enfants ne traitent pas les filles et les garçons de la même façon, n'ont pas les mêmes comportements dans la cour de récréation ou face aux maths c'est que l'ensemble de la société se comporte différemment avec eux.
Dès l'âge de 2 ans ils ont intégré qu'il y a avait des personnes de 2 sexes et connaissent rapidement le leur. Même ceux qui, n'ayant pas de frères et soeurs, ou n'ayant pas lu "Tous à poil " n'ont jamais vu d'autres organes génitaux que les leurs. Ils se conduisent conformément à ce qui est attendu d'eux par leur entourage, et conformément à ce qu'ils voient dans la rue ou à la télé.Les amener à réfléchir aux stéréotypes qu'ils véhiculent est intéressant.
Là dessus je vous conseille cet article déja ancien (2008) mais très clair à propos d'une étude menée dans une école maternelle Suédoise
Commentaires
rien à redire de plus. encore un très bon article;
Bravo. très clair, documenté.
ça fait du bien.
merci !
Super développement.
Je suis aussi souvent ammenée à rappeler que LES FEMMES SONT LA MOITIE DE L'HUMANITE et qu'elles ne sont pas une catégorie de même nature que les personnes porteuses de handicap ( qui sont hommes ou femmes, sauf aux toilettes où elles se transforment en femme, je n'ai pas encore compris comment), d'autres nationalités (femmes et hommes aussi), classes sociales (femmes et hommes aussi, bien qu'en bas il y ait plus de femmes mais là on revient au premier item),....
En revanche par la peine de citer Z... ses propos sexistes devraient relever de la justice si des lois, à l'identique de ce prévaut pour les propos racistes, existaient. Ce type doit être ignoré.
Un commentaire sur la réaction de Copé.
M. Copé s'est rendu compte qu'on parlait du genre dans les médias, qu'il y avait une partie des parents d'élèves qui était hostile à son enseignement (ou tout du moins très sceptique), et que ces gens pouvaient faire partie de son électorat. Comme il ne s'est pas beaucoup montré dans les manifs pour tous (notamment la dernière), il s'est tout simplement dit qu'il fallait frapper un grand coup pour que ces électeurs restent avec lui (au lieu d'aller voir au FN, chez Boutin ou à l'UDI...).
Alors il a trouvé ce bouquin. Bouquin qui n'a rien à voir avec le genre, ni avec l'égalité homme-femme, ni de près, ni de loin (c'est même le contraire : les personnages qui portent une robe sont réellement des femmes, le policier est un homme, les familles ont un papa et une maman...). Mais il s'est dit que ça ferait bien pour sa com'. Et ça a marché dans les médias.
Je ne pense pas que ceux qui protestent contre l'ABCD de l'égalité à l'école soient très dupes de la manœuvre.
Sur ce bouquin, je ne le ferai pas lire à mes enfants, en maternelle. Pour plusieurs raisons. D'abord, l'aspect pipi-caca-zizi de la littérature enfantine m'exaspère prodigieusement. Ensuite, il ne me semble pas urgent, à 4 ou 5 ans, de montrer à des enfants des adultes nus (je ne leur fais pas lire de Largo Winch par exemple, ils auront tout le temps de le faire plus tard), d'autant que je préférerais qu'ils soient un peu méfiants si un jour, un adulte se déshabillait devant eux. Enfin, il y a des bouquins très bien pour expliquer comment est fait le corps d'un garçon ou d'une fille, s'il n'ont pas de frère ou de soeur.
Pour ma part, je ne suis pas favorable à cet ABCD. Pas parce que je suis contre l'égalité entre hommes et femmes, évidemment. Mais parce que je crois que la vraie égalité, c'est de laisser chaque enfant, accompagné par ses parents, libre de faire ce qui lui semble bon : jouer à la poupée s'il le veut, choisir la filière qui lui plaît, et enfin le boulot qu'il veut. Et je ne fais pas forcément confiance à l'école pour ça, ni au gouvernements; de droite comme de gauche, qui pensent bien souvent que parce qu'un grand principe est inscrit dans la loi, la société va l'appliquer.
J'avoue que je ne comprends pas très bien la politisation des débats, comme si les discriminations hommes / femmes étaient de gauche ou de droite.
J'aurais envie de compléter par un lien vers un article publié sur le blog des vendredis intellos intitulé "comment le sexisme vient aux enfant" :
http://lesvendredisintellos.com/201...
et dont je retiens essentiellement que pour que les filles aient une bonne image d'elles-mêmes, il est important que les papas ( ou les hommes référents de leur entourage, je suppose) participent aux tâches domestiques. Qu'on se le dise !!
L'école a toujours enseigné le genre. Les politiques récentes on précisément pour but d'arrêter de l'enseigner.